lundi 17 mars 2014

Dans les fjords de Patagonie


Le 6 mars nous avançons enfin plein ouest par la Ruta 26. 
Nous avons dû faire un détour par Comodoro Rivadavia, la grande ville de la côte Est, pour changer notre radiateur. Une pierre de la piste l'avait percé et nous perdions régulièrement un peu d'eau. Nous avons préféré jouer la carte de la prudence et le remplacer à neuf chez le concessionnaire FIAT en faisant ce détour. Comme dit le proverbe : "Qui veut voyager loin ménage sa monture" ! 
L'idée est de couper au plus court d'Est en Ouest pour relier l'Atlantique au Pacifique par le "corredor bi-oceanico".


C'est un tracé peu courant et du coup nous découvrons une région moins arpentée par les voyageurs, la vallée pétrolifère de Colhue Huapi et les grands lacs de Sarmiento. 
Nous savons que c'est notre dernière traversée des steppes arides de Patagonie, alors nous profitons du vent d'ouest incessant qui marque tant ce territoire. 
A nous la solitude totale,  l'immensité de l'horizon et le ciel lumineux


En croisant le Rio Senguer, un vieux gaucho sorti de nulle part sur son cheval nous fait une belle surprise en venant discuter avec nous et nous interprétons cette rencontre comme un signe d'au revoir à la Patagonie argentine.


Nous rejoignons Rio Mayo par la Ruta 40 et retrouvons notre cher "Ripio".
Le Ripio c'est la piste, par opposition au "Pavimiento", l'asphalte.
Comme 140 km nous attendent avant la frontière chilienne, j'essaye de me renseigner autour de moi dans ce petit village balayé par le vent et la poussière.

"Como esta el ripio hasta Chile ?" 
Pour comprendre les réponses, il faut commencer à saisir toutes les subtilités de la langue.Car vous avez le ripio classique, qui diffuse de la poussière partout dans le camping car, le ripio "suelto" (cailloux traitres pour les radiateurs), le ripio "compactado" (terrible pour le confort intérieur), ou le ripio "calamina" (tôle ondulée, notre pire cauchemar). 
Alors quand le gars de la station service me glace le sang avec un nouvel adjectif : ripio "feo", ripio "moche" littéralement, j'avoue avoir voulu faire demi - tour vers l'Est ! 
Mais le Pacifique nous attend, et faire demi - tour c'est renoncer à la carretera austral, au ferry dans les fjords et à l'ile de Chiloe. 
Nous décidons d'avancer avec de la musique classique à fond pour faire passer la pilule… de toute façon on ne s'entend plus !
C'est donc à 20 ou 30 km à l'heure, que nous avançons sur la route 260 plein ouest, par Lago Blanco. Nous sommes tellement lents que nous bivouaquons au milieu du rien sur le bord de la route, avec un bon poulet grillé au BBQ dégusté au coucher du soleil.


Le lendemain 8 mars nous en finissons avec le ripio et traversons la frontière chilienne. En 10 km le paysage change complètement : montagnes, rivières, forêts, nous sommes en Patagonie chilienne influencée par l'Océan Pacifique. 
Plus de vent du tout, mais de la pluie ! Quel contraste, en à peine 1 heure !


Nous rejoignons ainsi la fameuse Carretera Austral (la "7") et profitons de cette ambiance de rainforest à Villa cerro Castillo, Puerto Ibanez, Coyhaique et Puerto Cisnes. 

Les Chiliens que nous rencontrons sont extrêmement chaleureux et nous avons l'occasion de goûter au Pisco sour, un alcool d'origine péruvienne pourtant revendiqué par le Chili. 
C'est Juan Carlos, le patron du restaurant,  qui nous en offre une coupe en l'honneur de la journée internationale de la femme !
Il nous offre aussi un énorme pôt de confiture de cerise ainsi qu'un morceau de marbre écrasé par les glaciers millénaires : pas idéal pour le poids dans le camping car, mais Mahé tient absolument à dormir avec ? !


Un soir nous dormons au niveau d'un col à 900 mètres d'altitude en croisant les doigts pour qu'il neige dans la nuit, mais non, le thermomètre ne descend pas en dessous de 8 degrés, de la pluie, encore de la pluie...

Heureusement les feuilles de Nalca, sorte de rhubarbe locale, sont très pratiques en tant que parapluie !
Nous descendons alors vers la côte à travers les forêts pour atteindre notre objectif dans le petit village de Puerto Cisnes :  le Pacifique
Aaaah, enfin l'Océan !!


Le 11 mars nous montons à bord du Jacaf, le ferry que nous avons réservé auprès de la compagnie Naviera Austral. 

Pour 120 euros tout compris nous nous offrons une croisière de 24 heures dans les fjords chiliens. 
Non seulement on avance bien sur notre parcours vers le nord en rejoignant le port de Quellon au sud de Chiloé, mais en plus nous contemplons des iles-montagnes magnifiques au milieu de l'Océan. 

C'est un dédale incroyable ou s'entremêlent forets luxuriantes, falaises abruptes, bras de mer et cascades qui tombent directement à la mer. 


Nous assistons ainsi à la vie locale au fil des 6 escales que le Jacaf effectue sur son parcours, Puerto Gala, Raul Marin ou Melinka, autant de villages reliés au reste de l'humanité uniquement par bateau, on y débarque des poutres en bois, des vivres et même un petit troupeau de bovins !
C'est un spectacle d'une autre époque, avec parfois comme seul quai une simple plage de galets !



Ce sont des moments magiques pour Séverine et moi sur le pont supérieur, les enfants eux s'enfilent une demi douzaine de films sur grand écran bien au chaud à l'intérieur… 


On ne peut pas leur en vouloir, cela fait bientôt 3 mois qu'ils n'ont pas vu la télévision !


Nous nous endormons dans le ferry, légèrement bercés par les ondulations régulières de la houle...

3 commentaires:

  1. Toujours le même plaisir de vous suivre. Bravo Reno pour ce gros travail de mise en page.

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  2. Comment ne pas dire au moins une fois "publiquement", l'émerveillement de vous accompagner d'étape en étape, de vor vos silhouettes et vos visages si chers hanter ces paysage mythiques de l'autre bout de la planète. L'Amérique du Sud, enfin ! Ainsi vous nous manquez un peu moins... Je voudrais vous dire aussi combien j'ai aimé l'article beaucoup plus personnel où vous étiez là, à prendre la parole chacun à votre tour pour faire entendre enfin votre voix individuelle, le ras-le-bol de la proximité et la joie de vous retrouver si unis. De mon côté, et pour des raisons identiques, je préfère largement rester en contact avec vous par courriel pour des échanges plus personnels. Ou par skype. Ah ! parler avec vous par skype !

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  3. Signature du commentaire précédent : Xuxuruca. J'ai bien bataillé pour réussir à en mettre un. Finalement il est parti tout seul avec 2 coquilles, tant pis !

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