vendredi 25 avril 2014

Le mystère des géoglyphes


Nous redescendons le 12 avril du salar vers le Pacifique. Du désert toujours du désert, mais comment peut on vivre ici ? Comment les Indiens ont ils pu organiser leur société dans ces contrées si inhospitalières ? Pas un arbre. De rares oasis.
Pour guider leur caravanes et leurs migrations, les peuples précolombiens ont inscrit sur les flancs des collines andines des géoglyphes, à la manière de repères GPS antiques.
Au bivouac près de Victoria nous explorons ces sites avec les enfants, fascinés. Des animaux, des points de repère, des silhouettes humaines, comme ça, en plein désert.



Nous nous arrêtons également au géant d'Atacama, représentation d'un homme de 86 mètres de haut datant de 900 après JC. Pourquoi cet immense homme - robot en plein milieu du désert ? Le mystère s'épaissit !



Le lendemain Mahé remet le Grand Condor dans la bonne direction de l'enquête grâce à un échangeur de voie dans une gare de trains désaffectée où nous avons dormi. 



La vieille ligne de chemin de fer remonte jusqu'à la ville fantôme de Humberstone. Tout un village de 3600 âmes consacré dans les années 60 à l'extraction du nitrate. Depuis la grande crise tout a été abandonné : école, mairie, église, théâtre et même piscine municipale à fond de cuivre, en plein désert ! Expérience très intrigante de visiter les maisons des ouvriers avec leurs meubles, la cuisine, la salle de bains… Nous avons adoré visiter les salles de classe avec les petits pupitres ! Séverine est tout de suite entrée dans la peau d'un professeur devant ses élèves Delphée et Mahé !


Ces traces humaines abandonnées renforcent encore un peu plus notre humilité face à cet immense désert. Cela fait 1000 km que l'on roule dans l'Atacama et tout ce vide nous donne un peu le vertige.

Pour nous rafraichir, nous bifurquons tout naturellement vers Iquique, ou nous pensions nous reposer dans une station balnéaire charmante. En fait nous trouvons une ville minière et duty free avec de grands immeubles très moches.
Nous n'aimons pas du tout l'ambiance de cette ville, coincée entre le Pacifique et une dune de 500 mètres de haut, qui vient en plus d'être secouée par le tremblement de terre du 1er avril. Pauvres habitants, quelle nature difficile dans ce nord chilien ! L'unique viaduc (à pic !) pour accéder à la ville est à moitié effondré et provoque d'énormes embouteillages ! Heureusement que le bain des marmailles dans le Pacifique sur la plage de Cavancha rattrape un peu le coup ! 



A l'extrême Nord du pays se trouve Arica, une grande ville beaucoup plus charmante avec de longues plages de sable gris clair. 

Nous y bivouaquons deux nuits, le 14 et 15 avril.

Nous allons au Musée archéologique observer des momies Chinchoro vieilles de plus de 7000 ans, étonnamment bien conservées dans le sable sec de la Vallée Azapa. 
Ces momies sont plus anciennes que celles d'Egypte et seraient les plus vieilles du monde !

Une première salle expose des objets ayant appartenu aux tribus indiennes disparues (outils,  instruments de musique, vêtements ou bijoux).
Une deuxième salle est consacrée aux momies et explique le procédé très complexe de momification des corps. L'une d'elle est recroquevillée en position foetale comme Rascar Capac dans Les 7 boules de cristal !

Les enfants ont une peur bleue des restes humains et des crânes ainsi exposés sous les vitrines et préfèrent sortir !
Heureusement une bonne aire de jeux les remet d'aplomb.



Le 16 avril, nous passons la frontière : à nous le Pérou !

Nous devons régler nos montres car il y a deux heures de moins qu'au Chili. 

Le dépaysement est total : les visages sont plus burinés, les habitations plus modestes et le trafic routier plus chaotique. 

Les restaurants de route proposent de déguster une sorte de hamster que nous n'osons pas tester pour le moment !
Nous roulons sur la Panaméricaine et traversons plusieurs monts arides et autres vallées verdoyantes. 

La vallée de Moquegua en est un exemple : on y cultive le pisco, un vin fermenté qui ressemble au cognac. C'est précisément dans une bodega que nous passons notre première nuit au Pérou, gentiment invités par les propriétaires.

Nous roulons 900 km sur la Panaméricaine, montant et descendant les vallées poussiéreuses à flanc de falaise. 
A chaque virage, nous retenons notre souffle et prions pour que le camion ou le bus qui arrive à fond en face de nous prennent correctement leur courbe ! 
Nous conduisons à tour de rôle, ultra concentrés alors que les enfants jouent ou lisent sagement à l'arrière du camping car. 

Avions nous le droit de leur imposer une telle aventure ?

Nous nous sentons coupables de les exposer à une route si dangereuse et égoïstes de vouloir réaliser nos rêves en les entrainant avec nous … Désolés pour nos lecteurs les plus sensibles (les grand-parents) mais ce voyage n'est pas toujours  le monde des bisounours ! Heureusement nous avons les cassettes old school de Dadi et une belle étape à Camana sur la cote Pacifique pour nous détendre ! 



Le 18 avril, nous voici déjà à Nazca, nous n'avons jamais été aussi près de notre rêve : le Machu Picchu !

Pour nous récompenser de nos efforts, nous nous offrons une nuit dans un camping-hotel  "la maison suisse" qui se trouve à l'entrée de la ville de Nazca. 
Piscine, WIFI, toutes les commodités et surtout des arbres, voilà ce qui nous manquait le plus ! 

Nous garons le Grand Condor à côté d'un flamboyant, sous un immense filao qui nous rappelle notre île chérie. 
La nuit sera agitée pour Delphée et Renaud, tout deux victimes d'une petite tourista ! Nous n'avons pas été suffisamment vigilant sur l'hygiène du dernier restau routier ! 
Pourtant la cuisine péruvienne est un vrai bonheur : à Tacna dès la frontière passée c'est une empanada au poulet qui explose ses saveurs dans notre palais. L'énorme salade de fruits à 1 euro nous rafraichit généreusement. Et le soir à Camana sur la cote on se régale de calamars grillés et de ceviche de poisson frais. Seule spécialité au goût un peu douteux : l'INCA KOLA (limonade péi) dont se passera volontiers !

Nous allons voir les lignes de Nazca depuis un mirador de 20 mètres de haut et pouvons à peine entrevoir deux dessins, les "mains" et l"arbre" ainsi que des lignes droites, très droites. Elles sont tout simplement creusées de quelques centimetres dans le sol et ont été préservées depuis plus de 2000 ans !

Comment ont-elles été réalisées et dans quel but ? Il y aurait également 70 dessins d'animaux et de plantes, plus de 800 lignes droites et près de 700 figures géométriques sur cet énorme plateau désertique. 

Force est de constater qu'on ne voit pas grand chose depuis le sol.
Pour mieux comprendre cette énigme, Séverine s'offre donc un survol en avion de la zone. Connaissant son profond vertige face au vide, Renaud est impressionné par sa détermination ! Il faut dire que les lignes de Nazca l'ont toujours fascinée depuis un certain épisode des Mystérieuses cités d'or ! 

Ce qu'elle voit est absolument incroyable : les dessins sont d'une telle ampleur et d'une telle géométrie qu'ils ne peuvent être vus (et compris ?) que depuis le ciel. 


Le singe, l'araignée, le flamand rose, le perroquet, la baleine, et ce condor somptueux. 
Tous en un seul et unique exemplaire.
Pourquoi ? Et pour qui ?
Autre question technique, comment les dessiner avec une telle précision sans point de vue aérien ?

Enfin, et sans vouloir tomber dans un ésotérisme primaire, certains trapèzes semblent indiquer des directions à suivre voire des pistes d'atterrissage.
Et le plus troublant, pourquoi sur une colline cette silhouette humaine casquée (que les scientifiques eux mêmes surnomment le "cosmonaute") dit bonjour de la main vers le ciel ? Mystère, mystère...

mardi 15 avril 2014

Dans le désert d'Atacama


Du 4 au 6 avril, nous suivons la panaméricaine le long du littoral chilien. Les paysages sont plutôt monotones, désertiques et vides. Nous faisons de courtes haltes dans des villes côtières pour bivouaquer. A chaque fois, nous arrivons en fin d'après-midi et profitons tout de même d'une jolie lumière. La plage de sable blanc de Bahia Inglesa et ses eaux turquoises sont par exemple une heureuse surprise. 


En revanche, l'agitation et la saleté d'Antofagasta nous donnent envie de fuir bien vite !
Le 7 avril, nous empruntons la ruta 25 puis la 23 pour San Pedro de Atacama. C'est la Ruta del Desierto ou tout n'est que désert et désolation ! 


Alors qu'à Santiago la capitale, l'entreprise Lipigaz avait évoqué des protocoles drastiques pour ne pas remplir notre bouteille de gaz argentine pour cause de valve différente, la succursale de la même Lipigaz à Calama nous la remplit sans problème ! Le contrôle interne ne doit pas être très rigoureux, mais nous, ça nous arrange pour se doucher chaud et faire cuire la soupe !

Nous arrivons en fin d'après-midi sur San Pedro de Atacama. Notre Grand Condor a gravi le col de plus de 3400 mètres de la Cordillera de la Paciencia !
Notre arrivée sur San Pedro est magnifique, c'est une immense cuvette où les eaux d'écoulement des Andes ont accumulé des dizaines et des dizaines de mètres de sel. Nous sommes époustouflés par les formations rocheuses de couleur rose orangé : c'est de l'argile que le vent et la pluie ont façonné au fil des siècles et qui, avec la lumière du soleil couchant, prend des teintes spectaculaires.


Nous garons notre camping-car sur le parking municipal et déambulons dans le village.

Les maisons et les bâtiments de San Pedro sont en adobe (briques d'argile cuites au soleil). 

La place centrale ombragée se trouve tout près d'une petite église dont le toit est fabriqué à partir de cactus. 

Que de délicatesse humaine dans cette environnement si hostile !


La rue principale est une succession de boutiques de souvenirs, d'agences de voyage et de restaurants. Le village de San Pedro est bien sûr très touristique mais reste charmant car le centre n'est pas accessible aux voitures, tout se fait à pied ou en vélo. Il y règne une certaine nonchalance fort agréable !
Nous retrouvons avec beaucoup de joie nos amis Cyril et Estelle en début de soirée et les suivons pour un premier bivouac au sud de San Pedro. Nos deux camping-cars se garent sur un ancien salar ou poussent, comme un miracle, quelques arbres épineux. Devant nous se dresse la cordillère des Andes et ses multiples volcans dont certains sommets sont enneigés. Nous arrivons juste à temps : les derniers rayons de soleil éclairent la chaine volcanique dominée par le magnifique Licancabur 5900 mètres, c'est magique ! 


Nous accrochons quelques ballons multicolores au camping-car et ouvrons une bouteille de champagne chilien pour célébrer l'anniversaire de Renaud. 
Estelle prépare même un gâteau au chocolat avec les ingrédients prévus par Séverine, pour qu'il puisse souffler ses 42 bougies ! 
Que c'est bon d'être entre amis dans un désert ! Car Cyril et Estelle sont devenus des amis avec qui l'on peut partager nos anecdotes de voyage mais aussi nos soucis et nos doutes. Que cela fait du bien de parler, seules des familles voyageant en camping-car comme nous peuvent comprendre ce que nous vivons depuis plusieurs mois !


Le lendemain, nous choisissons de nous initier au sandboard dans les dunes de sable de la Valle de la Muerte. 
Nous partons avec l'agence Atacama Inca Tour que tient Marion, une jeune Française qui s'est installée ici depuis peu. 
Le minibus nous conduit dans un paysage surréaliste de couleur rouge, on se croirait sur Mars ! 
Nous ne sommes pas déçus de la prestation de l'agence : pendant près de 2 heures, nous montons et descendons la dune avec nos planches sous un soleil de plomb ! 


Toute la famille s'éclate et Reno s'autorise même un mini tremplin. Après tous ces efforts, on nous conduit au mirador qui domine la Valle de la Luna pour un apéro convivial au coucher du soleil. La vue est vertigineuse ! 


Le 8 avril, nous décidons de nous rafraichir dans les eaux ultra salées de la Laguna Cejar qui se trouve à quelques kilomètres plus au sud. Le soleil est encore haut dans le ciel et nous sommes les seuls à nous aventurer sur la lagune. Renaud est le premier à se lancer dans l'eau ! Il est bientôt suivi par Mahé qui pique un véritable fou rire à flotter ainsi ! 



Delphée et Séverine se joignent rapidement aux baigneurs, improvisant un ballet aquatique à la surface de l'eau.
Nous quittons la lagune et nous empressons de rincer à l'eau douce nos corps et nos maillots tout blancs de sel. L'air est si sec à San Pedro que chaque respiration brule les narines et gerce les lèvres. Vive le Labello !


Le 9 avril, direction le Salar de Atacama et la Laguna Chaxa en compagnie de Cyril et Estelle.
Le salar est situé à une altitude de 2300 mètres et a une superficie de 320 000 hectares. Il est composé de mottes de sel séché avec de la terre sablonneuse amenée par le vent. C'est l'un des plus grands gisements de lithium du monde.
La lagune Chaxa est nichée au creux du Salar. Elle est le lieu de prédilection et de nidification de trois espèces de flamands roses (des Andes, du Chili et de James) que nous avons la chance d'admirer de très près. 
Un flamand nous offre un étrange ballet, tournoyant sur lui-même le bec planté dans la vase. Nous sommes subjugués par l'élégance de cet oiseau aux pattes si fines !



Un peu plus loin sur la lagune, d'autres flamands fouillent la vase au milieu de petits volatiles pendant que quelques lézards intrépides courent sur le Salar, cherchant un abri dans les cavités de sel séché. 
Mais comment font ils pour vivre dans un environnement aussi salé ? Toute la chaine alimentaire est basée sur ces petites crevettes capables de se reproduire dans ces eaux. Admirez la photo de l'accouplement en macro...

Au coucher du soleil, la lagune et le Salar prennent des teintes époustouflantes !


Après le sunset, les minibus de touristes quittent les lieux et le Salar de Atacama est enfin rien qu'à nous.
Nous sortons le BBQ et les tables de pique-nique sous les étoiles. Jamais un feu n'aura brillé avec autant d'audace en ce lieu !
Instants exceptionnels de communion avec la beauté du nouveau monde.

Cyril nous apprend à faire des photos amusantes avec une simple lampe torche.
On s'amuse comme des fous au milieu de la nuit, adultes comme enfants, pour notre dernière soirée en commun.


Le 10 avril, nous quittons avec émotion Cyril, Estelle et leurs filles. Peut-être nos chemins se croiseront-ils à nouveau au Pérou ou en Bolivie ?