vendredi 25 juillet 2014

La dernière ligne droite



Le 9 juillet, nous voici de retour sur les routes, pas fâchés finalement de retrouver notre quotidien dans le camping-car.

Nous empruntons la BR 101 qui longe l'océan Atlantique bordé d'une forêt incroyablement bien préservée. 

Il s'agit de la mata atlantica originelle qui couvre les montagnes du littoral entre Rio et Curitiba sur plusieurs centaines de kilomètres. 

Il pleut encore souvent mais nous pouvons profiter des plages de sable blond entre deux averses, comme dans cette petite station balnéaire de Trinidad ou à Ubatuba où nous dénichons un bivouac de rêve.


En plus, les vagues sont magnifiques ! Renaud s'empresse d'enfiler sa combinaison et d'aller surfer pendant que les enfants jouent au ballon sur un espace engazonné tout au bord de l'eau. Dans le ciel, la pleine lune se lève doucement. Nous savons avec un pincement au coeur qu'il s'agit de notre dernière pleine lune sur le continent sud américain. Déjà, la nostalgie du voyage nous gagne . . . 


Heureusement, nous avons une destination joyeuse tout près de Curitiba : la petite ville de Mafra où vit Ramon. Souvenez-vous, c'est le jeune Brésilien rencontré lors de notre premier séjour au Brésil :  Mahé et lui étaient devenus excellents amis à force de jouer au football sur la plage de Matinhos. Après quelques échanges de mails, rendez-vous est pris pour le revoir chez ses parents, Gigno et Jane.


Bien sûr, les deux garçons passent le plus clair de leur temps à taper le ballon dans le jardin ou sur des terrains municipaux et la jeune française Delphée n'est pas en reste !


Nous acceptons également la proposition de Gigno et Jane, tous les deux enseignants, de visiter leur école et de parler de notre voyage aux élèves. Nous mettons nos maillots de l'équipe de France pour le symbole et utilisons un globe terrestre gonflable pour mieux leur expliquer le projet. Beaucoup d'entre eux n'ont jamais quitté leur ville ni vu d'étrangers ! Leurs questions émouvantes et naïves nous font réaliser à quel point notre aventure leur semble complètement folle !
" Qu'est ce qu'on mange en France ?
Quelle différence y-a-t-il entre le Brésil et la France ?
Quels sports faites-vous en France ?
Avez-vous déjà touché la neige ?
C'est comment de prendre l'avion ?
Ramon et Mahé vont-ils pleurer au moment de se quitter ?
Comment dit-on maman en français ? "
Mahé et Delphée, intimidés au début, ont plaisir à répondre aux questions après la traduction de leur Papa et écrivent parfois quelques mots au tableau. C'est un grand moment d'échange que personne n'oubliera, eux comme nous.

Nous terminons notre court séjour chez les parents de Ramon par un churrasco gaucho typique au feu de bois agrémenté de chants de Séverine à la guitare.

Le lendemain le 16 juillet, les adieux sont déchirants pour les deux familles car cette fois-ci, tout le monde a bien conscience que nous ne nous reverrons pas de sitôt. 


Nous poursuivons notre route vers le Sud Ouest par la BR 282 en direction de Uruguaiana ou nous avons rendez-vous le 22 juillet pour la vente du Grand Condor. 

Pour quelques jours encore, nous profitons de pique-niques champêtres et de superbes bivouacs toujours autant insolites.


Sur la BR 153, nous essuyons un orage de grêle très impressionnant ! Les enfants sont terrorisés sous le vacarme des grêlons mais encore une fois, notre camping-car prouve qu'il résiste à toutes les intempéries. Au fur et à mesure que nous descendons vers le Sud, les températures se font plus fraîches, comme lors de notre premier été vers la Terre de Feu. Nous ressortons avec plaisir pulls et bonnets et apprécions la chaleur du BBQ lorsque nous y faisons griller des pignons d'araucaria.

Le 19 juillet, la route nous mène jusqu'aux anciennes missions jésuites, à Sao Miguel. Nous avions raté les églises jésuites lors de notre passage au Paraguay et en Argentine et n'avions donc plus d'excuses. Surtout que l'église de Sao Miguel est classée au Patrimoine de l'Humanité ! 

C'est à ce bivouac que, la gorge déjà nouée, nous trions nos affaires de fond en comble et que nous préparons la transmission du Grand Condor. Nous offrons à une association locale les vêtements que nous ne ramènerons pas pour aider les familles délogées par les inondations du mois dernier dans la région.


Nous choisissons la ville de Sao Borja comme ville étape, amusés par la curieuse ressemblance avec notre nom de famille.

Saint Bourjea. 
Aurions nous été bénis pendant ce voyage ? 
Oui, nous croyons en notre bonne étoile : pas d'accident, pas de maladie, pas de grosse galère mécanique, pas d'agression, ni de vol tout au long de ce voyage. 
Des peurs et des doutes, oui, mais n'en faut-il pas pour aller au bout de ses rêves ?

33.000 kilomètres, 8 mois, 7 pays, oui, on l'a fait !


Le Grand Condor arbore ainsi fièrement les blasons de tous les pays traversés et la carte de notre itinéraire qui s'achève.


Le calme et les prairies d'un minuscule aérodrome de campagne nous permettent de profiter d'un ultime bivouac tranquille.
Lors de cette dernière journée, nous déposons draps et serviettes à la laverie et faisons un dernier grand ménage dans le camping-car.

Le lendemain 22 juillet à 7 heures du matin (!) nous recueillons William et Anne sous le vent et la pluie à la frontière Brésil / Argentine.
L'orage et les éclairs semblent célébrer à leur manière ce moment redouté ou espéré, en tout cas inéluctable.
William et Anne, Bretons de l'Ile de Groix, nous ont acheté notre camping-car pour un autre voyage en famille avec deux de leurs enfants.

Après Ghislain et Virginie en 2013, ce sera le troisième tour en Amérique du Sud pour le Grand Condor, il connait le chemin !

Nous faisons route tous les 6 jusqu'à Buenos Aires durant deux jours, ce qui nous permet de faire plus ample connaissance et surtout de transmettre toutes les astuces de vie et de fonctionnement de la machine.
William et Anne sont très sympas, ce qui rend la transaction un peu moins difficile : nous savons qu'ils s'occuperont bien de notre compagnon à roues.


Le 24 juillet à midi, voilà c'est fini, il faut bien se séparer et se souhaiter beaucoup de "suerte" pour la suite.
Le coeur lourd nous regardons le Grand Condor s'éloigner vers sa nouvelle vie.
Merci pour tout, amigo !

mardi 15 juillet 2014

Maracanã et caipirinhas



Le samedi 28 juin, nous arrivons très en avance au stade du Maracanã afin de regarder le match Brésil / Chili retransmis en direct sur grand écran pour les supporters. 


Tout le public derrière le Brésil souffre devant l'inefficacité des attaques de la Selecao et pleure à l'image des joueurs tétanisés par la tension de l'enjeu. 


L'épreuve des pénaltys est un supplice pour tous.

Même Séverine laisse échapper quelques larmes de stress au moment où le beau Neymar s'avance pour tirer le cinquième et dernier tir au but : ouf, le Brésil est qualifié pour les quarts de finale et les tribunes explosent de soulagement ! 


Mais nous sommes surtout venus regarder le duel Uruguay / Colombie. Le stade est rempli de Colombiens en tenue de combat qui entament leurs chants de guerre à pleins poumons (olé olé ola mi Colombia va ganar !)


Il y a peu de supporters de l'Uruguay dans les tribunes. Notre voisin uruguayen nous raconte que son père était présent sur cette "cancha" en 1950 lorsque son pays a remporté la coupe du monde face au Brésil. D'ailleurs, certains n'hésitent pas à porter un maillot avec cette date qui fut un véritable cauchemar pour les Brésiliens.
Le stade grouille de 73.000 spectateurs, quelle ambiance !  Delphée n'a plus de voix à force de crier, Mahé veut descendre sur la pelouse taper quelques balles et nous les parents nous adoront la puissance de la OLA, lancée par un petit groupe de Colombiens survoltés.
Finalement, c'est bien une Colombie enthousiaste menée par son jeune attaquant James Rodriguez qui remporte le huitième de finale.
Nous rentrons en métro, sans aucun problème de sécurité ni de bousculade, l'organisation est parfaite.

Coté Equipe de France, cela se précise également.
Renaud est allé chercher Jérôme et Teresa à l'aéroport à 5 heures du matin, sans s'arrêter aux feux rouges bien sûr et en admirant le lever de soleil sur la baie de Guanabara.
Nous vivons un grand moment avec Jojo, Teresa et les enfants sur Copacabana l'après midi du 30 juin pour suivre le huitième de finale contre le Nigeria. 

Nous choisissons un bar de plage squatté par les supporters français et savourons des caipirinhas glacées pour supporter le stress de la confrontation !
A l'issue du match nous aussi nous pouvons chanter : "On est en quart, on est en quart, on est, on est, on est en quart !!!"
C'est la grosse fête, nous n'y voyons plus très clair, même le drapeau brésilien a pris les couleurs de la France !


Ca y est, ce sera donc un France / Allemagne au Maracana ! 
Oui, et en coupe du monde au Brésil s'il vous plait.
C'est une chance fantastique car Renaud a acheté les billets en septembre dernier sans savoir quels pays seraient à l'affiche !
La fine équipe Renaud, Jérôme, Térésa et le cousin Hervé qui nous a rejoint depuis Brasilia, se rendent au stade le 4 juillet en milieu de matinée. Les deux frères portent fièrement leur maillot français, ont un drapeau bleu blanc rouge sur leurs joues et brandissent le fanion national sur lequel est inscrit "La Réunion est à Rio".


L'ambiance des supporters des bleus est unique et le stress à la hauteur de l'enjeu. Renaud pleure en chantant la Marseillaise, allons donc ! C'est génial de voir les joueurs de si près, d'entendre le bruit des frappes sur le ballon et de sentir la foule vibrer dans les grands moments. Les Bleus jouent pas mal mais finissent par perdre.
Malheureusement le résultat sportif illustre bien la définition du football : "22 joueurs qui courent après un ballon sur un terrain et à la fin c'est l'Allemagne qui gagne !"

De retour du Maracana, tout le monde se retrouve dans un restau brésilien où Séverine et les enfants ont réservé une longue table devant l'écran géant. Le Brésil se qualifie contre la Colombie, la foule exulte ! Ouf ! La fête est sauvée !


Nous retrouvons aussi notre ami Mathieu sur la plage de Ipanema pour le coucher du soleil. 


Il est venu à Rio assister au quart de finale et ne reste que trois petits jours. C'est drôlement sympa de le retrouver !

Nous partageons (encore !) des caipirinhas dans un bar en bord de plage alors que la nuit tombe sur les moros des deux frères.
C'est notre dernière soirée à Rio, nous la savourons tout particulièrement. 
Chaque moment nous procure un plaisir intense et  nous ouvre déjà les portes de la nostalgie.

Après toutes ces émotions, nous aspirons à quitter la frénésie  du football pour nous reposer quelques jours sur la belle Ilha Grande.



Le 6 juillet nous sommes à six dans le camping-car avec Jérôme et Térésa et roulons pendant quelques heures, tantôt en bord de mer, tantôt au milieu de la forêt.

Nous attrapons in extrémis le bateau de 16h et effectuons la traversée de Angra dos Reis jusqu'à Ilha Grande sous un soleil radieux. 
Comme il n'y a pas de route sur l'île, notre Grand Condor reste dans un parking fermé. 
Les retrouvailles avec lui auront été de courte durée !


Nous prenons deux chambres dans une pousada et allons savourer une caipi (eh oui, encore) les pieds dans le sable avant de diner d'une délicieuse et copieuse muqueca (une casserole de poissons et fruits de mer) dans un restaurant sur la plage, sous un immense badamier. Pour digérer, nous allons danser un petit forro sur la place centrale où se tient un orchestre. Vraiment dépaysant !

Le lendemain, nous randonnons pendant trois heures dans une végétation très dense jusqu'à la plage de Lopes Mendes, réputée pour son sable incroyablement blanc et fin et ses rochers de granit. 
Les enfants se régalent de baignade, de body board et de foot tandis que les grands profitent de la beauté des lieux sous les rayons brûlants du soleil.


Le 8 juillet, c'est le jour de la fameuse demi finale Brésil 

/ Allemagne. Il pleut des trombes d'eau sur Ilha Grande, comme si le ciel pleurait lui aussi la défaite 7 à 1 du pays. 

Nous sommes à nouveau obligés de noyer notre chagrin sous les caipirinhas ! 
Le lendemain les titres des journaux sont à l'image du supplice vécu par les Brésiliens : "Honte, Humiliation et Tristesse ".
Le coeur serré, nous disons au revoir à Jérôme et Teresa qui prennent le bateau du retour, nous les retrouverons sur la Réunion dans quelques semaines.


Nous restons toute la matinée du 9 juillet pour profiter d'une autre randonnée conduisant à une petite cascade et une jolie plage de sable doré.



Et puis il faut bien se résoudre à quitter nous aussi ce paradis et à prendre le bateau de retour.
C'est la fin d'une étape pour la petite famille : il nous reste moins de deux semaines dans notre camping-car avant le changement de propriétaire. A nous les derniers bivouacs de la maison roulante !